Né en 1989, vit et travaille à Marseille.
Kevin Rouillard est-il un archéologue, un bricoleur, un collectionneur ? Il accumule en tout cas de nombreux objets qui finissent par s’entasser dans l’atelier. Là, il vit avec eux ou ils vivent avec lui, sans hiérarchie particulière. Ce qui compte, c’est les idées qu’ils libèrent, qu’ils sécrètent. C’est ensuite à force d’observation, de temps passé à les tester, les arranger, les agencer, que Kevin Rouillard parvient à brouiller peu à peu les certitudes concernant leur existence, leur provenance ou leur âge pour les faire glisser vers une nouvelle identité au sein de ses installations. L’accrochage, le dispositif qu’il construit pour faire vivre ces objets, est à envisager comme un théâtre où nous serions appelés à compléter l’histoire qui se joue.
Pour l’exposition « Empiristes », Kevin Rouillard présente les fruits d’une réflexion estivale sur sa manière de travailler. Il s’est inspiré du roman Moins que Zéro de Bret Easton Ellis qui l’a accompagné tout l’été et dans lequel le personnage principal, Clay, raconte son retour en famille à Los Angeles, pour les fêtes de Noël. Un récit « déprimant » où l’on traverse des fêtes remplies d’alcool, de drogues et de sexe pour un véritable plongeon dans la décadence des classes supérieures californiennes. Les images du désert brûlant et du vide sont omniprésentes et Clay revient régulièrement sur ces mots : « Disparaître ici, on peut disparaître ici, on peut disparaître ici sans même s’en apercevoir ».
Kevin Rouillard relie cette histoire à son expérience de l’atelier au cours des derniers mois : il a vécu seul dans un grand espace qui était celui de la galerie Cortex Athletico à Bordeaux, avec pour seul horizon les murs blancs de l’ancienne galerie éclairés par des néons. Pour résister à cet espace étrange, il a réalisé ce qu’il nomme des « boucliers » à partir de grands bidons métalliques, auxquels il a fait subir différentes transformations, parfois violentes, et qu’il présente aplatis et disposés côte à côte, dans un grand accrochage mural. L’installation Disparaître ici, 20 rue Ferrer – hommage direct à Moins que Zéro – est quant à elle une pièce composée de parpaings, d’ossements et de différents objets ou indices qui peuvent faire penser à un énigmatique autel. Les histoires des objets qui la composent s’entrelacent et se condensent, nous invitant à reconstruire le récit des événements qui lui ont donné une forme, temporairement muséale.