Raphaël Tiberghien

Né en 1988, vit et travaille à Paris.

Notre monde est-il rendu malade par trop de communication, trop d’échanges, trop de médias et pas assez d’idées, trop de langages et pas assez de langue ? Dans Le soulèvement des objets (2013), Raphaël Tiberghien dresse comme un impossible inventaire des nombreux débats qui agitèrent l’École Nationale Supérieure des Beaux-Arts de Paris en 2013.

Il s’agit de pots en argile disposés dans un coffrage rectangulaire, couvert d’une feuille de Plexiglas. Les spectateurs sont invités à se pencher pour écouter l’intérieur des pots, qui diffusent différents monologues, discours, conversations et autres « captations » de ces débats artistiques et politiques. Mais, ainsi juxtaposées les unes à côté des autres, toutes ces voix finissent par s’annuler pour former un brouhaha dont aucun sens ne semble pouvoir émerger.

Dans une autre pièce datée de 2013, La Poussière, poème déployé, Raphaël Tiberghien décompose un texte lu par un comédien. L’œuvre consiste en une platine vinyle où un disque tournant en boucle est relié à une enceinte qui diffuse cette « récitation » dont les mots prononcés semblent comme sculptés, travaillés, repris, découpés, recollés.

Comme si la langue devenait un matériel avec une épaisseur et des aspérités, comme une succession d’images altérées qui deviendraient une entière altérité.

Dans les Poèmes manufacturés, (2016), l’artiste utilise des plombs d’imprimerie pour inscrire un texte dans des plaques d’argile qui sont ensuite moulées en plâtre. Les aléas du procédé (en particulier la mollesse de l’argile) donnent une sorte de vie au texte, et font danser les lettres.

Le texte n’est plus un code sur une surface, mais une empreinte, une vérité physique de la parole, qui redouble l’épaisseur souvent intime de ce que l’on lit. Ainsi la langue semble reprendre son cours. Il ne s’agit plus d’une succession de pixels agglutinés sur des écrans uniformisés, mais à nouveau une singularité qui nous renvoie à l’essence de notre humanité. La langue, « C’est celle-ci qui renferme l’informulé et en fait don ». Texte par Gaël Charbau.

Œuvres présentées dans « Une inconnue d’avance»

Œuvres de l’artiste